Intensité carbone du mix électrique, kesako ?
Toute activité humaine a des impacts environnementaux, et la production d’électricité ne fait pas exception. Mais tous les moyens de production d’électricité ne se valent pas : certains, comme le photovoltaïque, nécessitent l’extraction d’une grande diversité de métaux ; d’autres, comme les centrales nucléaires, ont besoin de beaucoup d’eau pour fonctionner ; et d’autres encore, comme les centrales à charbon, émettent une plus grande quantité de gaz à effet de serre.
L’intensité carbone de l’électricité se rapporte à ce dernier point, puisqu’il s’agit d’une mesure de la quantité de gaz à effet de serre émis par kWh d’électricité produit. Cette dernière varie beaucoup d’un moyen de production à l’autre : la production basée sur les énergies fossiles est très carbonée à l’inverse des énergies renouvelables (ou EnR) et du nucléaire qui sont des énergies faiblement carbonées (Figure 1).
La production électrique d’un pays repose généralement sur un mélange de différents moyens de production ci-dessus : on parle de mix électrique.
En France, la répartition de la production d’électricité repose sur le mix présenté dans la Figure 2 ci-dessous :
Mais la production nationale ne suffit pas toujours à répondre seule aux besoins instantanés de consommation du pays : c’est pourquoi nous exportons/importons(2) de l’électricité avec nos pays voisins selon que le réseau produise respectivement trop ou pas assez d’électricité. L’intensité carbone de l’électricité consommées en France sur l’année est donc dépendante du mix électrique intérieur auquel il faut ajouter l’intensité carbone du mix électrique importé. Bilan, en France et pour l’année 2023, l’intensité carbone de l’électricité consommée en France fut en moyenne de 53 g eq. CO2/kWh(3). Cette intensité carbone est parmi les plus faible du monde. À titre de comparaison, la plus faible intensité de 2023 était de 16 g eq. CO2/kWh(3) pour le Nord de la Suède, tandis que la plus élevée était de 760 g eq. CO2/kWh(3) pour la Pologne.
Et le numérique dans tout ça ?
Le numérique est un grand consommateur d’électricité : en France, 10% de la consommation annuelle d’électricité viendrait de ce « secteur »(4). À l’échelle mondiale, si le numérique était un pays, il serait le 3e plus gros consommateur d’électricité au monde, juste derrière la Chine et les États-Unis(5). Et plus encore en réalité, car les études ici citées n’ont pu réunir des données sur certains périmètres du « secteur numérique » comme par exemple la fabrication des équipements, la gestion de la fin de vie de ces équipements ou encore la consommation des réseaux d’entreprises et de la récente explosion de l’intelligence artificielle (IA).
Il en résulte que les équipements informatiques (réseaux, terminaux utilisateurs et datacenters) n’ont pas le même impact sur le réchauffement climatique selon le pays dans lequel ils sont utilisés. Car un même équipement numérique, utilisé de la même manière en 2023 dans le Nord de la Suède plutôt qu’en Pologne, aurait eu 47,5x moins d’impact sur le réchauffement climatique !
L’intensité carbone du mix électrique est donc une donnée clef pour se diriger vers une utilisation plus durable du numérique.
💡 Astuce !
Si une entreprise vous annonce une empreinte carbone de consommation électrique inférieure à celle du pays où elle se situe (approche dite « location-based »), il s’agit à coup sûr de greenwashing !
Certaines entreprises, par exemple, affichent une empreinte nulle de leur consommation électrique parce qu’elles utilisent des EnR. Or, comme nous avons pu le voir plus haut, ces sources d’énergie sont certes faiblement carbonées mais ont une empreinte non nulle. D’autres entreprises achètent des certificats de garantie d’origine de l’électricité pour s’approprier de l’énergie « verte » d’une centrale en particulier, parfois située dans un autre pays. Cette approche est appelée en anglais « market-based ». Ceci est un pur et simple greenwashing, car on ne peut choisir les électrons qui viennent alimenter nos équipements… sauf à avoir une centrale à soi où l’on se branche directement. C’est pourquoi, en France, les accords d’électricité type PPA (pour Power Purchase Agreement) ne peuvent justifier le remplacement de l’intensité carbone du mix français par l’intensité plus faible de la source d’énergie concernée par le PPA.
Ayez donc toujours le réflexe Electricity Maps pour vérifier les dires des entreprises sur l’empreinte environnementale de leur consommation d’électricité.
(1) NREL (2021). Life Cycle Greenhouse Gas Emissions from Electricity Generation: Update.
(2) Données éCO2mix des échanges trans-frontaliers en temps-réel
(3) Données Electricity Maps pour la France en 2023
(4) Less-Perasso, E., Vateau, C., & Domon, F. (2022). Evaluation de l’impact environnemental du numérique en France et analyse prospective. Technical report, ADEME et ARCEP. (2e volet, p.95)
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Figure 1 et 2 réalisées avec des icônes de Konkapp et Freepik issues de Flaticon.
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Les données de la Figure 1 sont issues de la base empreinte de l’ADEME (Agence de la transition écologique) et du rapport 2021 du NREL (National Renewable Energy Laboratory, États-Unis).
Pour les données ADEME sur la Figure 1, l’intensité carbone pour l’éolien résulte d’une moyenne non pondérée entre l’intensité carbone de l’éolien terrestre et celle de l’éolien en mer. L’intensité carbone pour le photovoltaïque correspond à des panneaux fabriqués en Chine, ce qui est le défaut proposé par l’ADEME pour la France. Ces données présentent une certaine incertitude (données consultables gratuitement sur le site de l’ADEME).
Les données de la Figure 1 sont retranscrites dans le tableau ci-dessous :
Moyen de production | Données ADEME (g eq. CO2 / kWh) |
Données NREL (g eq. CO2 / kWh) |
Nucléaire | 3,70 | 13 |
Hydraulique | 6,00 | 21 |
Éolien | 14,9 | 13 |
Photovoltaïque | 43,9 | 43 |
Gaz | 418 | 486 |
Fioul | 730 | 840 |
Charbon | 1060 | 1001 |
Les données de la Figure 2 sont issues du bilan électrique de 2023 de RTE.
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